Poème

Porc, salaud et fasciste

« Tu n’es qu’un porc et un salaud » qu’elle me dit
J’en ai marre que tu écrives des saloperies sur moi
– Et moi, dis-je, j’aimerais que tu arrêtes de me les faire chérie. »
Et bien entendu ça ne calme rien
et je la voix courir dans la chambre
et je l’entends pleurer
et moi je m’affale dans le canapé
et il ne me reste plus de bière
et à peine quelques miettes de tabac.
Il fait chaud à suffoquer
le ventilateur est en panne
les moustiques me harcèlent
et ma chérie pleure
toujours

La chienne vient prêt de moi et je lui caresse la tête.
Elle commence à me lécher la main.
c’est sympa les chiens, c’est sans condition
y’a pas besoin de marchander avec eux
les femmes, c’est autre chose
quand on leur dit « oui » elles vous méprisent
quand on leur dit « non » elles vous haïssent.

J’allume la télé et je voix
un travelo algérien avec des cheveux bleus
qui chante braille
et se sent victime d’homophobie en France
tout le monde l’écoute, l’air attristé
Je me gratte les couilles sous mon caleçon
et je me demande si en Algérie
ce travelo aurait l’occasion de passer à la télé
avec ses cheveux bleus
pour venir chanter casser les tympans et
chouiner son sentiment de victime d’homophobie en Algérie.
Je me demande…
Mais… se demander ce genre de choses de nos jours
paraît que c’est fasciste.

Ok, porc, salaud et fasciste.

La chienne a fini de me lécher la main et s’attaque à l’avant-bras.
La chérie a fini de pleurer et commence son mur du silence.
J’en ai pour trois… peut être quatre jours.
Ensuite on s’expliquera
puis se sera fiesta de rire et de sexe pendant trois… peut-être quatre jours
et puis ça recommencera.

Et j’irai au boulot
et je verrai des travelos aux cheveux bleus pleurer à la télé
et ma femme me traitera de porc et de salaud
et
je paierai le loyer
de quoi bouffer
et un peu de bière et quelques cigarettes
et je sentirai son regard lourd sur moi
« mon père buvais aussi. Tu sais que je n’aime pas que tu boives »
Elle ne veut
ni conduire
ni faire à manger
ni que je le l’encule
alors comment dire ?
Dire qu’il n’y a pas si longtemps
elle disait à sa meilleure amie que j’étais
un homme exceptionnel.
Du coup sa meilleure amie est allée baiser
le prof d’aïkido de son mari.
Pareil… le porc salaud et fasciste que je suis se demande…

Pourquoi rien de ce qui est simple ne semble durer ?
Simple comme un bon repas accompagné d’une bonne bouteille
de rire et de draps propres
Pourquoi les grincements de dents, les pets au lit
le manque de tune, les dents jaunes, les menstruations
les maux de crâne au pieu, les « conditions à », les « si tu n’fais pas ça je… » ?
Pourquoi les guerres, les gosses qui changent de sexe, la haine de notre histoire ?
de nous-même ?
de nous m’aime ?
Pourquoi ces douleurs dans le dos,
l’angoisse de la retraite, la pauvreté, les juges
le lait de soja, la violence des hommes et le délire des femmes
Pourquoi tous ces pièges, les rats dans mon plafond, le frigo vide
les tâches sur les interrupteurs, le Contrôle Techniques tous les trois ans
Les 25% de charges pour les entrepreneurs, la décapitation des profs,
les cathédrales qui brûlent, les concombres au yahourt,
la famine, la NUPES, Macron ?

J’en sais rien pourquoi mais
puisque je le vois
ça doit venir de moi.

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