La Chronique du Fond de Cave

Et si un philosophe allemand avec une grosse moustache expliquait Macron aux fainéants ?

 

….Alors bien entendu dans la semaine, comme j’avais le cerveau un peu pris par mes gueules de bois à répétition et mes fantômes personnels, j’ai regardé la télé, les chaînes infos (ou intox, comme vous voulez). Et… heureusement que je suis un extrême cynique un brin branleur pour en rire tellement c’est affligent, de part et d’autre.
….Bon, pour ceux qui n’auraient pas suivi le truc, voilà le scandale : Notre Bien Aimé Grand Président À Peine Pubère Mais Néanmoins Divin n’a rien trouvé de mieux que d’aller à Athènes pour affirmer sa détermination face aux « fainéants, aux cyniques et aux extrêmes. » Quelle classe et quelle stature Mister Président !
….Il faudrait l’en remercier pour une chose : si ceux qui manifestaient trois jours plus tard manquaient d’idées pour leurs slogans, leur problème a été vite réglé.
….Personnellement ce qui m’a fait tiquer, c’est moins la tenue des propos – sur lesquels je reviendrai tout à l’heure – que leur contexte. Pour qu’un président « Jupitérien (hahaha !)» parle de politique intérieure à l’étranger, non seulement je trouve ça minable, mais comment ne se rend-il pas compte qu’il s’humilie davantage ? Imaginez un type – mettons un économiste ou une pointure universitaire – qui lancerait lors d’une conférence à New York sur les montants compensatoires (merci Desproges pour l’idée) « mon fils me mène la vie dure, mais j’ai décidé de lui faire poursuivre ses études et arrêter de fumer des joints coûte que coûte. Et s’il résiste à mon autorité ce petit con, moi je ne cèderai rien. »
….Qui est le plus humilié, la pointure universitaire ou son fils ? Vous pouvez arrêter la lecture deux minutes le temps de réfléchir un peu…
….Comme vous n’avez qu’à regarder la téloch’ ou écouter la radio pour voir que tout le monde y va de sa petite interprétation avec des mots comme mépris du peuple, arrogance de classe, …, ce qui n’est pas faux, je vais tenter de vous proposer une autre lecture… grâce aux travaux du pote de tous les nihilistes : Nietzche.

….(petite parenthèse : si vous n’avez pas fait d’études mais que vous voulez apprendre et que vous avez l’humilité de lire et bloquer une phrase dix minutes avant de l’intégrer, n’ayez pas peur de sa moustache et lisez ce mec, Zarathoustra en premier, puis le Gai Savoir, Ecce homo et Généalogie de la Morale, ça vous armera bien pour commencer. Fermeture de la parenthèse).

….En voyant Macron et tout le pataquès provoqué par ses propos, c’est une partie de Généalogie de la Morale qui n’est revenue en tête. Pour simplifier au maximum (je vais pas trop vous accabler non plus, cette lecture est lointaine déjà. Alors si y’a des spécialistes devant ces mots, pardonnez-moi, je ne suis qu’un écrivain à grande gueule, pas un thèseux), Nietzche colle et met en opposition deux formes d’évolution de la morale : la morale aristocratique, et la morale du ressentiment. Allez, pour ceux qui ne viennent pas de partir en courant, c’est là qu’il va falloir vous accrocher – et moi aussi.

….La morale aristocratique, vient étymologiquement (d’où l’intérêt de faire grec et latin, situé dans les racines de notre arbre généalogique linguistique) de aristos, meilleur, excellent, et kratos, le pouvoir, l’autorité. Pour faire court, c’est la morale de Macron, des puissants, des gouvernants, des élites, de l’oligarchie comme on dit maintenant, des castes dominantes en général. Cette morale si mes souvenirs sont corrects, appuie la notion de bon et de mauvais dans un contexte de réussite sociale, d’excellence, qu’elle soit éducative ou matérielle. Par exemple, il est bon d’avoir un langage noble, une culture riche, des affaires florissantes, une tenue droite (et pas gauche), etc.
….Par opposition, le mauvais signifie ici l’échec, le dominé, le manque de talent. Un mauvais élève, n’est pas un élève méchant, mais un élève qui ne réussit pas. Il y a aussi faire de mauvaises affaires, une mauvaise éducation, avoir un mauvais costume… Pigé ?

….La morale du ressentiment elle, exprime tout autre chose. Pour vite aller vers ma conclusion, on va la caser dans le camp des critiques de Macron. On peut dire pour faire TRÈS simple, qu’il s’agit d’une morale de vertu, religieuse, émotionnelle. Le bon signifie ici la bonté d’âme, la droiture, l’honnêteté,… en opposition au terme mauvais, qui signifie méchant, mal intentionné, fourbe, faux, qui agit selon ses propres intérêts sans se soucier des autres…
….Je ne vais pas faire des caisses sur la morale de ressentiment car je pense qu’elle est largement plus répandue et compréhensible que la morale aristocratique. Maintenant, regardez, c’est là que ça devient bath et que Nietzsche est génial, si je l’ai bien compris :

….Dans le langage de la morale aristocratique, le bon signifie la réussite. Le mauvais est donc tout ce qui s’oppose à cette réussite comme l’échec ou la pauvreté. Un mauvais garçon, ou une petite gens comme on disait au temps d’avant, est donc un homme qui manque de réussite, il n’a pas choisi d’être pauvre, il l’est, point.
….Être mauvais n’est donc pas un choix, mais un état.

….Contrairement au langage de la morale du ressentiment où le terme mauvais signifie davantage un choix. On ne nous impose pas d’être méchant, on en fait le choix (à prendre avec des pincettes hein ?).

….Donc, un BON patron qui a réussi ses affaires dans la morale aristocrate peut être un MAUVAIS patron, un salaud, un méchant bourgeois qui exploite ses ouvriers dans la morale du ressentiment. Et un MAUVAIS gars, un faible qui a échoué et vit dans la pauvreté peut-être un homme BON avec le cœur sur la main.

….Vous comprenez pourquoi je vous dis tout ça ? Macron et ses opposants NE PEUVENT PAS se comprendre. Et pour la simple raison qu’ils ne parlent pas la même langue et n’ont pas le même code moral. Ce n’est même pas un problème d’éthique, mais un problème de culture presque.
….Toute proportion gardée, dans certaines cultures l’excision paraît normale, dans d’autres c’est une barbarie. Dans certaines cultures, la Terre est notre mère, dans d’autres on ne se prive pas pour la couvrir de béton et lui faire des trous dans la peau pour la vider de son sang noir.

….Ainsi, je suis persuadé que lorsqu’il parle des cyniques, des fainéants et des extrêmes, Macron parle de tous ceux qui veulent empêcher la RÉUSSITE de ces réformes. Combien de fois a-t-il parlé de la GRANDEUR de la France ? Une idée élitiste non ?
….Ces décalages et incompréhensions entre le peuple et les élites ne datent pas d’hier, mais il faut avouer une chose, ça se voit de plus en plus que les riches commencent à en avoir vraiment plein le cul des pauvres. Et c’est là la différence entre les morales : certains savent que pour qu’il y ait des bons il faut des mauvais (des riches et des pauvres), alors que certains rêvent d’un monde bon (bonté).
….Exemple plus ancien pour appuyer ce que je dis (de super intelligent) : remember sa phrase durant la campagne électorale : « quand je vais dans une gare, je vois ceux qui ont réussi et ceux qui ne sont rien ».
….Après, je ne dédouane pas ce petit con, déjà parce qu’il brouille les pistes et que ce que je viens de dire plus haut ne tient pas vraiment la route. En effet, fainéant renvoie non plus à un état mais à une action (celle de ne rien faire okay, mais c’est tout de même une action).
….Et là je viens de me rendre compte que ce papier n’a aucun intérêt… (moment de big big solitude amen pas lol du tout)
….Rien que pour ça, y’a des tartes dans la gueule qui se perdent… Sans compter qu’il assume s’asseoir sur le débat démocratique dans le pays qui a inventé la démocratie, niveau cynisme ça se pose là.
….Ce qui me fout le plus les foies, c’est que Macron contribue à la honteuse réputation de mon pays à l’étranger. S’il y a une chose pour laquelle j’ai une morale aristocratique, c’est bien mon pays, ma langue, sa culture et son histoire. Si l’on choisit d’être dans le monde aristocratique – comme le fait Macron – on se comporte comme un aristocrate. Pas comme une petite frappe. Et puis, ne s’est-il pas dit le président de tous les Français ? Entre ça et les « losers » de Trump (même symptômes : comportement de mauvais mais discours de morale aristocratique), si j’arrive à vendre quelques bouquins avant qu’une bombe nous tombe sur la croûte, je serais bien content.

….Voilà, j’espère que je vous ai apporté quelque chose pour nourrir votre réflexion. Maintenant à vous de voir bande de cyniques fainéants.

2 thoughts on “Et si un philosophe allemand avec une grosse moustache expliquait Macron aux fainéants ?”

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