Une de la semaine

Chronique Souterraine #30 – Sans compter les poêles sans queue et sans couvercle, les queues sans poil et les casseroles en déperdition

Et quand ils entendent des futilités, ils s’en détournent en disant :
« À nous nos actions et à vous les vôtres. Que la paix soit sur vous! »
(Puis en eux-mêmes se disent) : « Nous n’allons pas débattre avec des ignorants! »
(Coran 28:55)

 

….J’étais en train de la débourrer depuis moins de cinq minutes lorsque j’ai dû arrêter brutalement : une immense douleur m’irradiait le gland. Mais vraiment, je sentais mon cœur battre au bout de ma queue, et ça faisait MAAAAL !
….« Putain bébé, tu me rayes le casque ! »
….Elle éclata de rire !
….« Grosse tête ! Tu me baises avec mon tampon ! »
….« Pourquoi tu ne me l’as pas dit ? »
….« Pas eu le temps mon cochon. »
….J’ai roulé sur le côté et ai saisi la bouteille de vin sud-africain à côté du lit. Il en restait une dernière gorgée. Un peu triste, je la bus. Le poète avait raison : les dernières gorgées sont toujours un peu tristes.
….En face du lit, l’écran maousse de la télévision nous illuminait en silence. On y voyait Bruce Campbell découper une vieille zombie à coup de hache. La vieille zombie marchait toujours malgré un bras en moins et les tripes à l’air. Une coriace. Le décor était bleu rouge et vert, assez joli. On devait approcher des trois heures du matin.
….« Ben alors mon cochon, tu ne me finis pas ? »
….« Ton cochon à la bite passés au rabot, va falloir que tu te débrouilles seule ce soir »
….Mary commença à se débrouiller seule. J’aurais pu l’aider mais cette histoire de Tampax à la laine de verre m’avait vexé. Je savais que ce n’était pas la faute de Mary mais que voulez-vous, il y a des heures et des instants où la mauvaise foi domine la sagesse. Chez moi ces heures et ces instants-là arrivent très vite. On a beau tenter de se refaire, se défaire est plus dur.
….À côté, Mary commençait à couiner fort à cause de ses doigts et sa tête devenait rouge, tandis qu’à la télé, la vieille zombie se faisait éclater la sienne (de tête), piégée en étau entre les puissants doigts de Bruce. Puis Mary gicla sur le lit, la cervelle gicla sur l’écran, et tout redevint calme. Sauf mon gland, lui prenait la leçon de mes empressements, leçon que de toute façon, il ne retiendra pas.
….« Ça va mon cochon ? »
….« J’ai la bite poncée Mary, comment tu veux que ça aille ? »
….« Je peux peut-être l’apaiser ? »
….Mary glissa sous les draps et commença à me l’hydrater. Ça me lança instantanément.
….« Oh putain ! Mais t’as de l’acide à la place de la salive ma parole ! Vire ta bouche de là ! »
….Mary vira sa bouche de là, remonta en haut du lit et commença à tripoter son téléphone. Cette meuf et son téléphone…
….Le plus marrant avec Mary c’est qu’une fois devant son Facebook, sa capacité de concentration équivalait à celle du poisson rouge :
….« Non mais c’est vraiment des connards de balancer les poubelles comme ça n’importe où ! Et après on se demande pourquoi y’a la dengue à la Réunion ? Quelle bande de cons !… Oh elle est jolie cette robe ! »
….Je trouvais ça rigolo quand je ne trouvais pas ça désolant.
….Bruce s’attaquait maintenant à tronçonner un zombie en commençant par l’entrejambe. Ma queue me fit savoir qu’elle n’était pas d’accord. Pour éviter de trop la contrarier, je sortis prendre dans le frigo la canette de soda d’un de mes colloc’, me la posa sur le zboube et revint dans la chambre. Mary sourit.
….« T’es vraiment un gros cochon »
….« Croyez aux discours de ces vieilles personnes qui trompent la jeunesse. »
….« Koi ? »
….« Rien, c’est un poème débile que doit apprendre mon fils »
….« Comment s’est passée sa rentrée au fait ? »
….« Bien. La moitié de ses potes ne sont plus dans sa classe. La maîtresse est sévère et donne plein de devoirs. »
….« Et tu trouves ça bien ? »
….« C’est lui qui m’a dit que ça c’était bien passé. J’y peux rien s’il est maso. »
….« Comment va ta queue ? »
….« Elle a l’impression de lécher un glaçon. Ça va. »
….Je me suis mis à penser à mon avocat. Celui de mon compost. Je veux dire… Mon jardin n’est pas vraiment un jardin. Disons plutôt un gros tas de gravats de construction foutu là avec un peu de terre bien tassée dedans. Le tout, à l’ombre, et en précisant qu’à chaque fois qu’il pleut, les maçons ayant pensé à placer des drains, l’eau stagne sur 50 centimètres de haut, transformant le jardin en étang durant une semaine et le mur de la salle de bains en plantation de salpêtre. Ça c’est pour la partie arrière. La partie du jardin profitant le plus du soleil, elle, est une dalle de béton tout ce qui a de plus conne, décorée par différentes ordures appartenant aux propriétaires et un énorme climatiseur de chambre froide, jamais servi mais tout rouillé. Ma porte d’entrée est une grille qui ne ferme jamais, donc la pluie entre à cœur joie dans la cuisine les jours de cyclone. Voilà où je loge. Donc, pour faire pousser un peu des trucs, j’ai pris la terre tassée de gravats, ai essayé de la détasser, l’ai foutue sur le béton et ai semé de la roquette, de la mâche, des tomates, une courgette, du basilic et des fraises. Les fraises s’en sortent bien, les tomates crèvent de maladie et le reste se fait défoncer par les limaces. Mais dans la partie arrière (celle à l’ombre qui a tendance à se transformer en étang), avec trois palettes pourries j’ai fabriqué un composteur. Et quand je dis compost, je dis épluchures, cartons d’emballage, mégots de cigarettes herbes arrachées et gravats sortis de la terre. Et c’est là que pousse un avocat, tranquille seul, qui pète plus la forme à lui tout seul que tout mon jardin réuni. Moralité : c’est celui qui grandit dans l’endroit le plus pourri qui s’en sort le mieux.
….Mon gland atrophié par le froid ne me faisait plus trop mal.
….Mary sortit nue du lit, se vêtit d’une serviette de bain et alla pisser. À son retour elle était furieuse.
….« Pfff ! Tes gros porcs de coloc’s ! J’ai nettoyé la cuisine à midi et elle est déjà dégueulasse !
….« Ben mets-leur un mot chérie. »
….« Quoi comme mot ? »
….« Je sais pas… « Si tu ne manges pas de porc, ne vis pas dans une porcherie » ou « un coup d’éponge ne te brisera ni la main, ni la virilité ». Un truc du genre… »
….« C’est pas un peu raciste ça ? »
….« Depuis quand la religion est une race ? »
….« C’est vrai… Mais pourquoi tu leur dis pas toi ? »
….« Parce que j’en suis plus au stade où je dois le dire Bébé. Là, c’est soit je me tais soit je tape. Et j’ai pas envie de coller une ambiance de merde dans la coloc’ »
….« Dis plutôt que tu es un gros lâche. »
….« Aussi. »
….« Je me demande vraiment ce que je fous avec toi. »
….« Moi aussi. »
….« Ça veut dire quoi ÇA ? »
….« ÇA veut dire que je me demande aussi ce que tu fous avec moi. »
….« T’as vraiment pas de couilles. »
….« Te toute façon, avec vous les meufs, on est baisés. »
….« Comment ça ? »
….« Vous ne comprenez rien aux hommes, de comment ça marche. Si je bande pas, je suis un nul, un impuissant et une sous-merde. Et si tu fourres ma queue dans ta bouche et que je bande alors que J’AI UN PUTAIN DE MAL À LA BITE, c’est que je le veux bien dans le fond. »
….« Je vois pas le rapport. »
….« Une fois j’ai bandé alors que je prenais le bain avec mon fils tout bébé. Est-ce que ça fait de moi un pédophile ? Non. Seulement tout y était : l’humidité et la chaleur. »
….« Et ça suffit pour te faire bander ? »
….« Ta bouche et ta chatte sont foutues avec de l’humidité et de la chaleur, alors oui, ça suffit. »
….« Je vois toujours pas le rapport avec tes colloc’. »
….« Moi non plus, mais je trouvais important de le souligner. »
….« Tu sais que je vais t’en faire baver si tu ne leur dis pas de… »
….« Je sais, t’es une femme. »
….« ÇA VEUT DIRE QUOI ÇA ENCORE ?!!! »
….« ÇA veut dire que MÔA, par nature, je suis démonstratif : je gueule, je crie, je tape. TÔA, et tous les gens de ta foutue race, vous faites vos coups en douce, en jouant sur la culpabilité ou le reproche, la pression psychologique, affective, ponctués de phrases assassines et de regards qui en disent long. »
….Mary porta sur moi un regard lourd de conclusion avant de se retourner et de tripoter encore un peu son téléphone. Elle pouffa : « N’importe quoi ! En plus d’être un lâche tu comprends rien. Et ne t’avise pas de vouloir me baiser avant d’avoir réglé le problème de la cuisine ». Qu’est-ce que je disais ? Jeannot le prolo attire tous les fouets alors que c’est Jeannette qui tient la tapette.
….« Et puis c’est totalement con ton film ! Tu veux pas baisser ! Je bosse Môa demain ! »
….Pour un peu de silence, j’ai baissé le son du film au point de ne plus rien entendre. M’en fous, je le connais par cœur depuis mes quinze ans. Sacré Bruce tout de même.

….En me roulant une dernière clope, j’ai complètement arrêté de penser à mon gland, maintenant, c’est ma barbe qui me grattait. Jamais tranquille. J’ai pensé à prendre une douche. Puis je me suis rappelé qu’il fallait se déshabiller pour se rhabiller ensuite. Trop fatigant. J’aurais aimé me prendre un verre mais y’avait plus rien à boire, hormis une canette de soda chaude puant le gland saignant. Alors j’ai fermé les stores et j’ai commencé à penser à Mareva. Maréva : petite rouquine tatouée avec un fichu caractère et des tendances sexuelles dans l’air du temps. Le genre de monture où il est possible de bouffer la chatte tout en caressant les cheveux. Tout à la fois vulgaire et raffinée. Je nous imaginais faire un soixante-neuf en poirier, puis la pipe irlandaise (avec du whisky), le Salvateur Délit, l’arroseur-assumé, le jungle-food suivi d’un presse-bite, une petite Cavalcade dans les abysses, et pour finir, enfin, je me voyais déjà lui décaper la turbine à chocolat tout en lui tenant les couettes à pleines mains. Du grand art ! De la maxi baise ! Et je me suis remis à bander. Et je me suis tourné vers Mary. Et Mary m’a envoyé chier. Alors j’ai repensé à la douche… Après tout, une petite branlette sous l’eau… ça peut pas faire de mal ? Puis j’ai pensé que mon gland ne supporterait pas les frottements, et que Mareva était macquée avec un gars dont la tronche avait été comme aplatie par un bus, mais vu qu’il était chef de rang dans une boîte à la mode… avec la paie qui va avec… Et après c’est moi le sournois ?
….Du coup, je me suis imaginé être Bruce Campbell mais dans mon style à moi : une zombie bleue avec une corne en couenne en forme de f poussant au milieu du front bondissait derrière moi. Des limasses lui sortaient de la gueule et elle me menaçait avec une éponge Spontex en forme de chatte. La zombie bleue voulait m’éradiquer la bite à force de frotter avec la partie râpeuse de son éponge. « Gros dégueulasse,qu’elle disait, je vais te nettoyer ça ! ». Moi j’avais pas peur. Même après son premier revers qui m’a envoyé défoncer la porte de la chambre pour atterrir dans le salon, j’avais toujours pas peur, en revanche, j’avais mal.
….Je me suis relevé héroïquement et, tranquille, j’ai attendu le bon moment pour lui choper la tronche et la poser sur la plaque électrique de la cuisine. Puis j’ai mis le feu en position 9. Les tâches de gras collées à la plaque ont commencé à glouglouter et à frire la vieille peau bleue. C’était marrant. Alors j’ai frotter la tronche de la zombie bleue sur toute la plaque, allumant tous les feux au max, et le gras partait bien, pas besoin de salir une éponge. En cuisant, la peau de la tronche de zombie a commencé à dégager une agréable odeur de steak. Alors de ma main libre, j’ai commencé à découper des tranches de visage bleu pour les faire revenir sur la plaque. Dieu que ça sentait Booon ! Ça m’a excité et j’ai senti la gaule pousser. Alors, tout en maintenant à la cuisson la tronche de la vieille zombie bleu, j’ai sorti mon dard en béton et lui ai planté bien profond dans le nombril. J’ai commencé à la buriner à lui en détartrer les vertèbres. Le frottement avec les tripes avait quelque chose d’agréable et d’assez serré. Je me suis alors concentré à coordonner mes mouvements : va et vient pour le bas, un côté et l’autre pour faire bien cuire mes steaks plus en haut. Comme c’était bon ! Comme ça SENTAIT bon ! La vieille zombie se mis à vomir des liquides bien frais : du rhum, de la liqueur d’abricot, du sirop de grenadine, du jus de citron vert, du jus d’ananas et un peu de sirop de canne. Parfait pour faire des Zombies !
….J’en récupérais un vite fait avant qu’il ne fonde sur la plaque et l’ai englouti cul sec. Un vrai régal. En maintenant la tête contre le grill j’ai malencontreusement arraché quelques cheveux. Son crâne était tatoué : on y voyait un bus encastré dans un poirier. Je me suis marré et ai rebu un cocktail de vomi tout en niquant plus ardemment le nombril. Les steaks étaient bientôt prêts. Mes boules allaient lâcher la purée. Alors, j’ai saisi une tranche de steak cuite à point avec une fourchette, j’ai attendu le moment de pondre la semoule pour prendre la première bouchée. Et là… LÀ…
….Je me suis réveillé.

 

(si cette lecture vous a plu, merci de la partager)

et toujours à la vente 😉

2 thoughts on “Chronique Souterraine #30 – Sans compter les poêles sans queue et sans couvercle, les queues sans poil et les casseroles en déperdition”

  1. Short

    J’ai été particulièrement émue par cette chronique que j’ai trouvée poignante. Elle regorge de tristesse, de nostalgie et de poésie

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